LE CHANT DU VIOLON
Ce matin, Rémy se réveille en sursaut. Son rêve était pourtant merveilleux : un violon jouait une mélodie douce et envoûtante lorsque soudain, plus rien. Du noir puis un bruit sourd de bois qui se brise et celui métallique des cordes qui se cassent.
Rémy est un garçon de 12 ans. Il a de grosses difficultés au collège, étant dyslexique et dysorthographique. Il a en revanche un don pour le violon : il en fait depuis ses 3 ans grâce a son grand père qui lui a transmis cette passion. A 12 ans seulement, il joue les Quatre Saisons de Vivaldi, des sonates de Mozart, les 24 Caprices de Paganini et bien d’autres encore. Son ancien professeur était une jeune femme charmante qui avait conseillé à sa mère de l’envoyer dans une école de musique spécialisée pour ces petits prodiges. Pour cela, il lui faut passer un concours et c’est là où se pose le problème : Rémy est un très grand stressé. Le morceau qu’il doit jouer ne lui est pas imposé mais doit figurer sur une liste fixée par l’école de musique. Aujourd’hui, il part pour une colonie de vacances spécialisée où il doit suivre des cours de musique parmi d’autres musiciens.
Isabelle regarde son fils monter dans l’avion, son étui à la main et son sac sur l’épaule. Elle lui fait un signe de la main puis se dépêche de repartir pour ne pas être en retard à son rendez-vous. A l’intérieur, Rémy s’installe. Après quelques heures de vol, il arrive à destination et séjourne parmi un groupe d’enfants jouant tous d’un instrument de la famille des cordes. Au collège, Rémy n’a pas d’amis. Les autres le trouvent très rêveur. Il ne partage d’ailleurs ni leurs jeux, ni leur passion pour le foot et le tennis de table. Mais dans cette colonie, il rencontre Margot, une fille qui a le même âge que lui et qui joue de l’alto. Elle aussi est dysorthographique. Ils deviennent rapidement amis, étant tous deux incompris des autres.
Margot adore les citations sur la musique, telles que << Je mets ensemble les notes qui s’aiment >> de Mozart, ou encore << La musique commence là ou s’arrête le pouvoir des mots >> de Wagner. Elle aime les réciter en musique, sur un air enregistré ou en regardant le paysage, les yeux dans le vague. Elle a des cahiers remplis de ces citations qu’elle garde comme un trésor. Rémy, qui n’en avait jamais entendu parler aime beaucoup les entendre. Il les trouve comme une caresse du soleil une froide journée d’hiver, le bruit apaisant d’une rivière clapotant doucement.
A la colonie, les cours qu’ils suivent sont intensifs, à un tel point que Rémy se sent quelque fois dégoûté du violon. Lui qui a toujours connu la facilité dans ce domaine, il ne comprend pas pourquoi son jeu ne convient jamais au professeur. Margot, dont la cousine a déjà séjourné à la colonie, lui explique que, par peur que les élèves ne relâchent leurs efforts, on ne les félicite jamais. Rémy reprend donc goût à la musique et un mois plus tard, il quitte la colonie avec la certitude de réussir son concours. Margot, elle, en passe aussi un mais pour entrer dans une petite école dans le Sud de la France.
A son retour, sa mère ne le reconnaît pas. Rémy a tellement travaillé, tellement persévéré qu’on peut voir le feu de sa détermination brûler dans ses yeux. Le jour du concours arrive et Rémy ne peut s’empêcher de trembler en arrivant devant le grand bâtiment blanc. Il essaye de se calmer en s’échauffant, en faisant des gammes dans toutes les positions mais pas moyen de la chasser, la nervosité est toujours là. Il décide donc de jouer son morceau. Il le joue, le rejoue encore et encore. Son tour arrive et, une fois sous les projecteurs, Rémy tente de calmer les battements de son cœur. Il respire un grand coup pour donner le signal de départ à la pianiste puis ses doigts s’animent et son archet vole au-dessus des cordes, sous le regard attentif du jury.
Son passage terminé, Rémy quitte la salle soulagé puis, une vingtaine de minutes plus tard, la délibération se fait et on annonce les musiciens sélectionnés. Le jeune violoniste, fébrile, se tient face au jury et entend prononcer son nom tandis que sa mère le sert dans ses bras, les larmes aux yeux.
Sitôt rentré, Rémy envoie un mail à Margot pour l’informer de sa réussite et surfe sur YouTube en quête d’un nouveau morceau. Il écoute, réécoute, cherche lorsqu’il tombe sur un morceau joué par Itzhak Perlman, un grand violoniste tel que Yehudi Menuhin ou encore Didier Lockwood, plus récent. C’est le morceau dont il a rêvé, la nuit précédant son départ pour la colonie. Il se renseigne, cherche puis trouve la partition. C’est décidé, le reste des vacances, il travaillera ce morceau-là.
Cat-Thy D. 5ème B